Résumé de la thèse

Au cours des dernières décennies, les expériences visant à mesurer des antineutrinos menées à courtes et longues distances de réacteurs nucléaires et utilisant des détecteurs basés sur la désintégration β inverse (IBD) ont révélé un déficit systématique et significatif d'antineutrinos détectés par rapport aux flux prédits. Outre cet écart de flux, appelé anomalie des antineutrinos de réacteur (RAA), une différence dans la forme des spectres mesurés par rapport aux prédictions reflétant l'état de l'art a été observée. Aucune preuve d'un biais expérimental n'a été mis en évidence comme étant à l'origine de ces divergences, et l'interprétation de la RAA comme une nouvelle oscillation de neutrino avec un état stérile est pour l’instant défavorisée par de récentes expériences placées à courtes lignes de vol d’un réacteur. La validité des prédictions est aussi remise en question comme source des divergences observées, ce qui a motivé une révision des modèles de spectres d'antineutrino de réacteur. Dans ce contexte, une nouvelle prédiction a été développée et est présentée dans cette thèse de doctorat. Les antineutrinos de réacteur sont émis lors de la désintégration β⁻ des produits issus de la fission du combustible nucléaire (²³⁵U, ²³⁸U, ²³⁹Pu, ²⁴¹Pu). Lors d’une telle transition, un noyau excité éjecte en corrélation un électron et un antineutrino. La probabilité d’émission totale et les spectres en énergie associés à chacune de ces deux particules sont caractéristiques du noyau initial et du noyau final, et dépendent de leurs structures nucléaires et atomiques. Le spectre antineutrino émis par un cœur de réacteur résulte ainsi de la superposition de milliers de spectres β. La prédiction revisitée est basée sur la méthode par sommation qui consiste à modéliser chacune de ces transitions β. Une modélisation avancée de la théorie de la désintégration β a été utilisée pour inclure différents effets dus à l'interaction électromagnétique entre l'électron émis et le noyau fils par un traitement numérique. Les données nucléaires expérimentales les plus récentes sont utilisées pour modéliser les milliers de désintégrations contribuant au spectre antineutrinos d'un réacteur, incluant les mesures de spectroscopie d'absorption totale γ. Une propagation détaillée des incertitudes associées à la fois à la modélisation et à l'évaluation des données nucléaires a également été effectuée, permettant de générer un budget d'incertitude cohérent et conservatif pour les spectres ainsi modélisés. La nouvelle modélisation par sommation est finalement comparée à l'état de l'art des prédictions de spectre de réacteur, et ses améliorations et limitations sont discutées en considérant des jeux de données IBD collectées par de récentes expériences réacteurs à courtes et longues lignes de vol.

Mots clés

neutrino, réacteur, particule, modélisation, calcul numérique, désintégration β

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